La Norvège, petit pays situé au nord de l’Europe, est connue pour ses paysages naturel magnifique, ses fjords, son peuple chaleureux, mais aussi pour son économie florissante, en grande partie grâce à ses ressources naturelles abondantes, mais pas seulement.

Le fond souverain de Norvège est un outil économique unique en son genre, dans cet article je vais vous présenter les différents aspects de ce fonds souverain, de son fonctionnement à son impact sur l’environnement et les générations futures. Nous nous pencherons également sur les limites et les critiques qui lui sont adressées, ainsi que sur les différences avec la France en termes de modèle économique, par exemple sur les retraites.

Le fond souverain de Norvège : qu’est-ce que c’est ?

Le fond souverain de Norvège est un fonds d’investissement d’une valeur de 1 148 Milliards d’euros, créé en 1990 pour gérer les excédents budgétaires de l’État norvégien liés à l’exploitation de ses ressources naturelles, principalement le pétrole et le gaz. Sa mission est de générer des revenus pour les générations futures en investissant dans des projets à long terme.

Au 31 décembre 2022, la valeur totale du fonds norvégien s’établissait à un montant colossal de 1.148 milliards d’euros (12.429 milliards de couronnes norvégiennes ou « kroner »), soit l’équivalent de 210.000 euros pour chaque Norvégien Ces chiffres donnent une idée de l’importance du fonds souverain norvégien pour l’économie du pays et ses habitants.

Et même, en cette fin de premier trimestre de 2023 les résultats sont publiés, et le fonds souverain norvégien vient de réaliser plus de 80 milliards d’euros de bénéfices.

Qu’est ce qu’un fond souverain ?

Un fonds souverain est un fonds d’investissement détenu et géré par l’État, qui investit dans divers actifs tels que des actions, des obligations, des biens immobiliers et des matières premières. Le but d’un fonds souverain est de préserver et de faire fructifier la richesse nationale à long terme. Les fonds souverains sont souvent créés par des pays riches en ressources naturelles, comme la Norvège, qui cherchent à gérer leur revenu pétrolier de manière responsable et à diversifier leur économie.

Objectifs visés par la création du fond souverain de Norvège

Le fond souverain de Norvège a plusieurs objectifs principaux. Il vise à garantir une gestion durable des ressources naturelles du pays en investissant une partie des revenus générés par l’exploitation du pétrole dans des projets à long terme. Il s’agit également de stabiliser les finances publiques en épargnant les recettes pétrolières pour les générations futures. Enfin, le fond souverain de Norvège cherche à soutenir la croissance économique à long terme du pays et à améliorer les conditions de vie de ses citoyens.

  1. Assurer une gestion responsable et durable des ressources financières de l’État norvégien
  2. Protéger la richesse et le bien-être des générations futures
  3. Investir dans des entreprises qui respectent des critères éthiques, sociaux et environnementaux stricts ;
  4. Favoriser la transparence et l’ouverture envers le public et les investisseurs.

Quelles différences avec la France ?

Il est intéressant de noter que le modèle économique norvégien diffère considérablement de celui de la France. En France, l’État est fortement impliqué dans l’économie, à travers la propriété partielle ou totale de grandes entreprises et industries (EDF, SNCF, ALSTOM), ainsi qu’une forte réglementation du marché du travail.

En Norvège, l’État joue un rôle de régulateur et de superviseur, laissant le secteur privé gérer les entreprises. Le fonds souverain norvégien, bien que géré par l’État, est conçu pour être apolitique et indépendant, ce qui lui permet de fonctionner comme un investisseur à long terme, sans être influencé par les décisions politiques à court terme.

Cette approche économique a permis à la Norvège de maintenir un niveau de vie élevé et une économie prospère à la différence de la France, malgré sa petite population et sa dépendance historique au pétrole. Le fonds souverain a été créé pour garantir que les ressources naturelles ne soient pas épuisées trop rapidement, en investissant dans des projets durables et en fournissant une source de financement à long terme pour le pays.

La Norvège est un exemple unique de réussite économique grâce à une combinaison de ressources naturelles, d’une politique fiscale bien gérée et d’un investissement judicieux dans l’avenir. Quand dans le meme temps l’économie de la France chute sans arret ( le PIB francais à chutée de 8.3% en 2020, un record).

Historique de la création du fond souverain de Norvège

La Norvège a revendiqué la souveraineté sur le plateau continental norvégien en 1960, de nombreuses compagnies pétrolières internationales ont obtenu des licences pour chercher du pétrole en mer du Nord. Lorsque la production de pétrole a commencé en 1971, les revenus ont rapidement augmenté, mais les dirigeants norvégiens ont vite compris que cette manne financière ne durerait pas éternellement et qu’il fallait prévoir un plan pour l’avenir.

C’est dans ce contexte qu’est né le fonds souverain norvégien, conçu pour être investi à long terme tout en permettant de puiser dedans si nécessaire. Il a été placé sous la gestion de Norges Bank Investment Management en 1998, une filiale de la Banque de Norvège créée spécialement à cet effet.

Le fonds a connu plusieurs moments importants depuis sa création. En 2008, il a commencé à investir dans l’immobilier, cherchant ainsi à diversifier ses investissements. En 2011, il a réalisé ses premiers investissements immobiliers à Londres et aux États-Unis.

En 2017, un nouveau modèle de gestion a été introduit, où Norges Bank décide de l’allocation de l’immobilier dans les limites des restrictions du mandat. La valeur du fonds a atteint un billion de dollars américains en 2017, soit un trillion de dollars, et 10 000 milliards de couronnes norvégiennes en 2019, faisant du fonds norvégien l’un des plus importants au monde.

Le fond souverain norvégien est souvent cité en exemple pour sa gestion responsable et à long terme, assurant un contrôle fort du gouvernement. Les directives parlementaires ont ainsi guidé sa gestion tout au long de son existence. Cette gestion responsable s’explique notamment par la volonté de protéger les générations futures, qui bénéficieront des retombées financières de l’exploitation pétrolière actuelle.

En France, la question de la gestion des ressources naturelles a également été soulevée à plusieurs reprises, contrairement à la Norvège, la France n’a pas créé de fonds souverain pour gérer ses revenus pétroliers. Les ressources pétrolières de la France ont été principalement exploitées en Afrique, et les retombées financières ont été réparties dans le budget général de l’État.

Des voix se sont élevées pour demander une meilleure gestion de ces ressources, notamment en vue d’investir dans des secteurs porteurs pour l’avenir, si on veut assurer une retraite pour nos générations futures par exemple.

Comment fonctionne le fond souverain de Norvège ?

Structure organisationnelle du fond souverain de Norvège

Le fond souverain de Norvège est géré par Norges Bank Investment Management, une filiale de la banque centrale norvégienne. Le fonds est supervisé par un conseil de surveillance et un comité d’investissement indépendant. Ces organes sont chargés de superviser la gestion des investissements et de veiller à ce que le fonds soit géré de manière responsable.

Stratégie d’investissement mise en place par le fond souverain de Norvège

Le fond souverain de Norvège suit une stratégie d’investissement à long terme, basée sur la diversification de son portefeuille. En effet, le fonds investit dans de nombreux secteurs économiques, tels que les actions, les obligations et les biens immobiliers, ainsi que dans de nombreux pays à travers le monde. Cette stratégie de diversification permet de minimiser les risques et de maximiser les rendements sur le long terme.

En effet, le fonds est interdit d’investir dans les entreprises qui contribuent directement ou indirectement au meurtre, à la torture, à la privation de liberté ou à d’autres violations des droits de l’homme dans les situations de conflit ou de guerre. Le Conseil consultatif sur l’éthique du fonds utilise les données de RepRisk ESG Business Intelligence pour surveiller les entreprises dans le portefeuille du fonds pour des violations graves des droits de l’homme, en particulier en ce qui concerne le travail des enfants, le travail forcé, les violations des droits individuels dans les zones de conflit ainsi que la corruption et la dégradation environnementale.

En 2010, le fonds a retiré 17 entreprises de tabac de son portefeuille, tandis qu’en 2014, il a vendu ses participations dans 59 des 90 entreprises de pétrole et de gaz qu’il détenait pour un montant de 30 milliards de dollars. Le fonds a également vendu ses actions dans 53 sociétés de charbon dans le monde entier, ce qui a entraîné une baisse de 5 % de la valeur totale des actions de charbon du fonds à 9,7 milliards de dollars.

En mars 2019, le ministère des Finances a recommandé au fonds de se désinvestir de ses participations dans l’exploration et la production de pétrole et de gaz. Le fonds est également de plus en plus tourné vers les énergies renouvelables, avec l’interdiction d’investir dans les entreprises produisant plus de 20 millions de tonnes de charbon par an. Le fonds prévoit de vendre pour plus de 10 milliards de dollars d’actions d’entreprises utilisant trop de combustibles fossiles.

Composition du portefeuille du fonds

Le fonds souverain norvégien est principalement investi en actions, avec une allocation de 60 %, suivie d’obligations à hauteur de 35 % et d’un petit pourcentage de 5 % en immobilier. La majorité de ses investissements sont effectués en Europe, notamment en France où le fonds est le premier actionnaire de deux tiers des entreprises du CAC 40, y compris des entreprises telles que Axa, Carrefour, Capgemini, Renault, Sanofi, Gemalto et la Société générale. Cette forte concentration sur un petit nombre d’entreprises et de secteurs pourrait rendre le fonds vulnérable à des risques sectoriels ou de concentration, notamment en cas de choc économique ou financier important.

Le fonds pourrait également être exposé à des risques liés à des choix d’investissement spécifiques, tels que le choix d’investir massivement dans des entreprises ou des secteurs dont la performance future pourrait être incertaine.

Performance et impact du fond souverain de Norvège

Le fond souverain de Norvège a connu une croissance spectaculaire depuis sa création. En 2021, il était évalué à plus de 1 400 milliards de dollars, ce qui en fait l’un des plus grands fonds souverains du monde. Le fonds a également connu une performance remarquable, avec des rendements annuels moyens de près de 6% depuis sa création. L’impact économique du fond souverain de Norvège sur le pays est également significatif, il a permis de stabiliser les finances publiques et de maintenir la croissance économique du pays, tout en créant des emplois et en améliorant les conditions de vie des citoyens norvégiens.

Pourquoi le fond souverain de Norvège est important ?

Impact sur les générations futures

En utilisant les revenus du pétrole pour investir dans une variété d’actifs à travers le monde, le fonds vise à assurer la stabilité économique à long terme du pays et à fournir des ressources pour les générations futures.

En comparaison avec la France, la Norvège a investi une plus grande partie de ses revenus pétroliers dans un fonds souverain, plutôt que de les utiliser directement pour les dépenses gouvernementales. La France n’a pas de fonds souverain comparable, bien que le pays ait créé un fonds de réserve pour les retraites en 1999, qui est géré par la Caisse des Dépôts et Consignations. On en voit les résultats en cette période de grève contre la réforme des retraites en France, un bel échec francais.

Il est difficile de comparer directement l’impact du fonds souverain norvégien sur les générations futures avec la situation en France, car les deux pays ont des contextes économiques et sociaux différents. On peut quand meme dire que le fonds souverain norvégien a permis à la Norvège de s’assurer une stabilité économique à long terme et de protéger les générations futures contre les fluctuations du marché pétrolier.

En France, les décisions relatives à l’utilisation des revenus pétroliers ont été prises au cas par cas, sans stratégie à long terme clairement définie.

Impact sur l’environnement

Les directives éthiques du fonds de pension norvégien ont un impact significatif sur l’environnement. Le fonds a interdit les investissements dans les entreprises qui contribuent directement ou indirectement à la dégradation de l’environnement, et il surveille les entreprises de son portefeuille pour détecter les cas de dégradation flagrante de l’environnement et de corruption.

En mars 2014, le parlement a nommé un groupe d’experts chargé d’examiner si le fonds devait céder ses actifs dans le secteur du charbon, conformément à son mandat d’investissement éthique. Le panel a recommandé au fonds de suivre une stratégie d’engagement des entreprises plutôt que de désinvestissement, mais le fonds sera tenu de désinvestir des entreprises qui tirent au moins 30 % de leur activité du charbon.

En 2014, le fonds s’est désengagé de 53 entreprises charbonnières dans le monde, dont 16 aux États-Unis, 13 en Inde et 3 en Chine. En conséquence, la valeur totale des avoirs du fonds dans le secteur du charbon a diminué de 5 % pour atteindre 9,7 milliards de dollars.

En 2019, le fonds de pension norvégien a introduit de nouvelles directives qui lui interdisent d’investir dans des entreprises qui produisent plus de 20 millions de tonnes de charbon par an. Le fonds prévoit de vendre plus de 10 milliards de dollars d’actions d’entreprises utilisant trop de combustibles fossiles. Le fonds devient plus respectueux de l’environnement en investissant dans des entreprises qui promeuvent les énergies renouvelables. Par exemple, le fonds continuera à détenir des participations dans des entreprises comme Shell qui utilisent des divisions d’énergie renouvelable. Les lignes directrices éthiques du fonds de pension norvégien en font un leader en matière d’investissement respectueux de l’environnement, ce qui pourrait avoir des conséquences positives pour les générations futures en Norvège.

En comparaison, la France ne dispose pas d’un fonds souverain dont les lignes directrices éthiques sont similaires à celles du fonds de pension norvégien. Cependant, les investisseurs et les entreprises françaises se sont de plus en plus tournés vers l’investissement durable ces dernières années, en partie grâce à l’adoption de l’Accord de Paris en 2015. En 2016, le gouvernement français a lancé la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte, qui vise à accélérer la transition de la France vers une économie à faible émission de carbone. Cette loi comprend des mesures visant à promouvoir le développement des énergies renouvelables, à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à améliorer l’efficacité énergétique. En outre, le gouvernement français a mis en place des obligations vertes, qui permettent aux investisseurs de financer des projets respectueux de l’environnement, et a encouragé les entreprises à adopter des pratiques de responsabilité sociale. Même si la France ne dispose pas d’un fonds souverain doté de lignes directrices éthiques similaires à celles de la Norvège, le pays avance à grands pas vers une économie plus durable.

En 2023, cette relation à l’environnement se reflète notamment dans sa décision de s’engager à ne posséder que des entreprises aux activités décarbonées d’ici 2050. En outre, le fonds a également pris une position ferme en refusant de suivre la résolution climat proposée lors de l’assemblée générale de BP. Cette décision peut sembler contre-intuitive pour un fonds qui se veut « zéro carbone », mais elle s’explique par la nécessité de tenir compte de l’ensemble des enjeux financiers, environnementaux et sociaux. En effet, le fonds norvégien considère que le dialogue avec les entreprises est plus efficace que les pressions externes et qu’il peut ainsi avoir un impact plus significatif sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Limites et critiques du fond souverain de Norvège

Bien sûr, le fonds souverain norvégien est l’un des plus importants investisseurs dans le monde, avec près de 1 200 milliards d’euros d’actifs sous gestion. Bien que le fonds se soit engagé à ne détenir que des entreprises ayant des activités décarbonées en 2050, il est exposé à plusieurs risques.

Risques liés aux investissements

Tout d’abord, le risque financier. Le fonds souverain norvégien est très dépendant des performances des marchés financiers et des entreprises dans lesquelles il investit. Les entreprises décarbonées peuvent ne pas être aussi rentables que celles qui ne le sont pas. De plus, le fonds peut être exposé à des risques liés à des investissements dans des technologies non éprouvées, qui peuvent ne pas réussir.

Ensuite, il y a des risques politiques. Le fonds souverain norvégien est contrôlé par le gouvernement norvégien et son Parlement, qui peuvent décider de changer les règles de fonctionnement du fonds ou de changer les objectifs en matière de durabilité. En outre, le fonds peut être exposé à des risques géopolitiques liés aux pays où il investit, qui peuvent être soumis à des instabilités politiques ou économiques.

Critiques liées à l’éthique et à la durabilité

Bien que le fond souverain de Norvège soit guidé par des principes éthiques et environnementaux stricts, il n’est pas à l’abri des critiques. Certains critiquent le fait que le fonds investisse dans des entreprises impliquées dans des activités controversées, telles que l’exploitation minière ou la production d’énergie fossile, même si ces entreprises respectent les principes éthiques et environnementaux du fonds. D’autres critiques suggèrent que le fonds devrait aller plus loin dans ses investissements liés à la durabilité, en investissant davantage dans des projets liés à l’énergie renouvelable ou à la réduction des émissions de carbone.

Enfin, il y a des risques environnementaux. Bien que le fonds souverain norvégien se soit engagé à n’investir que dans des entreprises ayant des activités décarbonées, il peut être exposé à des risques liés à des investissements dans des entreprises qui ont des activités environnementales controversées, comme l’exploitation minière, la production de pétrole et de gaz, ou la production de produits chimiques toxiques. Ces risques peuvent conduire à des répercussions négatives pour l’environnement, ce qui peut nuire à l’image du fonds.

Le succès du fonds souverain norvégien : une inspiration pour la France

Le fonds souverain norvégien est un exemple réussi de gestion de l’argent public. Créé pour gérer les recettes pétrolières du pays, il a réussi à générer des rendements élevés grâce à une stratégie d’investissement à long terme et diversifiée. Il a mis en place des politiques environnementales et sociales strictes pour guider ses investissements, ce qui en fait un leader mondial en matière d’investissement responsable.

En comparaison, la France n’a pas de fonds souverain de cette ampleur pour gérer ses recettes publiques. Bien que le pays dispose de nombreux organismes publics d’investissement, leur gestion et leur performance ne sont pas là, comme le démontre la problématique de la réforme des retraites. De plus, la France est souvent critiquée pour son manque de transparence dans la gestion de ses finances publiques.