On dit qu’une image vaut mille mots. Vaut-elle encore plus lorsqu’elle permet de résoudre un mystère de longue date ?
En 2013, Elena Kronberg, scientifique du Cluster, participait à un atelier à Tromsø, en Norvège. Un soir, les prévisions d’aurores semblaient prometteuses, et Elena a donc cherché un endroit sombre. Le ciel ne l’a pas déçue. Alors que des spirales vertes inhabituelles tourbillonnaient au-dessus de sa tête, elle a pris cette magnifique photo et s’est mise à chercher à savoir comment elles étaient créées.
Huit ans plus tard, Elena charge Katharina Maetschke, son étudiante en licence à l’université Ludwig-Maximilians de Munich, d’expliquer la forme de la spirale à l’aide des données des missions Cluster de l’ESA et Themis de la NASA. Les deux chercheurs estiment que c’est la première fois qu’une photo amateur d’une spirale aurorale prise depuis le sol est comparée à des données provenant de satellites.
Katharina et sa petite équipe de collaborateurs ont trouvé une correspondance intrigante : au moment précis où Elena a vu la spirale dans le ciel, Cluster a vu une spirale se déplacer vers la région au-dessus de Tromsø dans la bulle magnétique qui entoure la Terre. La théorie proposée est que des particules rapides provenant du Soleil ont formé une spirale dans le champ magnétique de la Terre. Ils ont ensuite fait tourbillonner les lignes de champ magnétique et cartographié les spirales aurorales correspondantes dans le ciel.
Il s’agit là d’une explication possible, mais pour vraiment découvrir comment les spirales aurorales sont créées, les scientifiques doivent relier davantage de photos prises au sol aux données couvrant le champ magnétique de la Terre depuis l’espace. Malheureusement, la photo d’Elena est la seule sur laquelle l’équipe a pu travailler. C’est pourquoi l’Institut international des sciences de l’espace travaille à la coordination des observations des aurores par les citoyens.
Les deux prochaines années sont particulièrement prometteuses pour l’observation des aurores et le repérage des spirales, car le Soleil approche de son pic d’activité. Tous les 11 ans environ, de nouvelles salves de particules énergétiques sont envoyées dans notre direction, percutant le champ magnétique de la Terre et illuminant le ciel de couleurs et de formes étonnantes.
Ce regain d’activité tombe à point nommé pour la mission ESA/CAS Smile, dont le lancement est prévu en 2025 et qui vise à mieux comprendre le lien entre le Soleil et la Terre. Smile observera les aurores en continu dans la lumière ultraviolette, en reliant ce qu’il voit à ses observations du champ magnétique terrestre dans les rayons X.
Bien que la mission Cluster touche à sa fin, le premier de ses quatre satellites devant rentrer en toute sécurité dans l’atmosphère terrestre en septembre prochain, les données recueillies au cours des 24 dernières années resteront précieuses pour les recherches futures. Smile s’appuiera sur Cluster et complétera les découvertes scientifiques qu’il a déjà permises.
Les recherches d’Elena et de Katharina, intitulées ‘Un mécanisme possible pour la formation d’une spirale aurorale se déplaçant vers l’esta été publié dans Frontiers in Astronomy and Space Sciences.
(Texte ALT de l’image : Photo d’une aurore verte brillante au-dessus des lumières de la ville, prise de l’autre côté d’un plan d’eau. L’aurore couvre la majeure partie du ciel et forme une spirale distincte. Les lumières de la ville sont très chaudes et orangées. Sur la gauche de l’image se trouve un arbre, presque aussi haut que l’image elle-même. Quelques nuages sont éparpillés dans les parties inférieure et droite du ciel).