Ces dernières années, les coups d’État militaires dans les pays africains menacent la position de la France dans les anciennes colonies.

Le coq en rouge, blanc et bleu est le symbole même de la France.  Au Niger, il a été décapité.

Le coq en rouge, blanc et bleu est le symbole même de la France. Au Niger, il a été décapité.

Le dernier dimanche de juillet, le stade de Niamey, la capitale du Niger, était rempli de monde. La foule n’était pas là pour regarder le football, mais pour faire la fête. Quelques jours auparavant, l’armée avait perpétré un coup d’État contre le président Mohamed Bazoum.

Quelqu’un avait peint un coq en rouge, blanc et bleu. Depuis le Moyen Âge, le coq est un symbole de la France. Il n’était pas difficile d’interpréter le symbolisme lorsque les manifestants lui ont coupé la tête.

En cas de doute, la décapitation a été accompagnée de cris de « à bas la France ».

Fin pour la famille Bongo

Un mois plus tard, fin août, elle frappait le Gabon. Les militaires ont jeté à la porte le Premier ministre Ali Bongo. La famille Bongo a dirigé le Gabon d’une main de fer après que le père d’Ali, Omar, ait pris le pouvoir en 1967.

Lorsqu’Ali Bongo a triché pour remporter une nouvelle victoire électorale en août, l’armée en a eu assez.

L’empire s’effondre

Le Niger et le Gabon sont d’anciennes colonies françaises. Même si l’empire colonial français en Afrique s’est effondré il y a 60 ans, des liens étroits existent entre Paris et les capitales africaines.

Le président Emmanuel Macron s’est rendu 18 fois en Afrique depuis qu’il est devenu président en 2017.

Macron a indiqué que la France n’accepterait plus que ses partenaires en Afrique violent les droits de l’homme et s’enrichissent aux dépens de la population.

C’est une rupture avec la politique des prédécesseurs. Les autorités françaises ont traditionnellement vu du doigt la corruption des dictateurs. Ils ont fourni des soldats et un soutien financier pour tenter de stabiliser les régimes.

Surtout pendant la guerre froide, il était important de maintenir ces pays dans la « sphère d’intérêt occidentale ».

Au cours des trois dernières années, des coups d’État ont eu lieu dans sept anciennes colonies françaises. Plusieurs d’entre eux ont clairement eu un coup dur contre la France. Les partisans des putschistes ont brûlé des drapeaux français et manifesté devant les ambassades françaises.

Le Financial Times a récemment cité l’ancien Premier ministre français Dominique de Villepin :

– Symboliquement et politiquement, cela témoigne d’un déclin à long terme pour la France, et malheureusement le danger existe que les choses empirent.

Maazou Akali du Niger a célébré le coup d'État en se rendant chez un tailleur et en faisant confectionner un drapeau russe.

Maazou Akali du Niger a célébré le coup d’État en se rendant chez un tailleur et en faisant confectionner un drapeau russe.

En regardant vers l’est

Peu après le coup d’Etat au Niger, Maazou Akali se rend chez un tailleur. Il voulait un drapeau blanc, bleu et rouge. Pas les Français, mais les Russes.

Dans le stade de Niamey, les manifestants ont crié non seulement « à bas la France », mais aussi « vive Poutine ».

Au Mali et au Burkina Faso, les bases militaires françaises sont fermées après les coups d’État. Au Niger aussi, les Français ont été avertis que leurs soldats devaient partir. Depuis une dizaine d’années, ces militaires jouent un rôle important dans la lutte contre les extrémistes islamistes.

La Russie est prête à combler le vide de pouvoir qui se produira lorsque les Français se retireront. Dans plusieurs pays, des mercenaires du groupe Wagner ont pris le relais des Légionnaires étrangers français.

Ce qui arrive à Wagner est incertain après la mort du leader Eugène Prigojine.

A bas la France, vive Poutine, tel est le message de ces habitants de Niamey, la capitale du Niger.

A bas la France, vive Poutine, tel est le message de ces habitants de Niamey, la capitale du Niger.

La jeunesse dans les villes

– Ces coups d’État sont tout à fait différents, dit Tor A. Benjaminsen.

Il est professeur à l’Université norvégienne de l’environnement et des sciences de la vie.

– Au Mali et au Burkina Faso, ce sont de jeunes officiers qui ont pris le pouvoir. Au Niger, cela ressemble davantage à une révolution de palais où des parties de l’élite prennent le pouvoir à une autre partie. Ils n’ont guère la même dynamique anti-française que dans les deux autres pays, poursuit-il.

Le professeur Tor A. Benjaminsen est un expert du Mali et du Sahel.

Le professeur Tor A. Benjaminsen est un expert du Mali et du Sahel.

Il souhaite en même temps nuancer l’image que l’on se fait de ces pays.

– L’antifrançais et le pro-russe sont probablement quelque chose que l’on voit principalement parmi les jeunes des villes.

Il estime que la chose la plus importante que la Russie puisse offrir est une alternative aux Français.

– Pour beaucoup, c’est attrayant en soi.

Benjaminsen dit qu’il est difficile de dire quoi que ce soit avec certitude sur ce qui se passera à l’avenir. Les efforts du groupe Wagner contre les djihadistes ne semblent pas très efficaces. Dans le même temps, leur brutalité s’étend à la population civile en dehors des grandes villes.

– Et ce que vous parlez de rébellion djihadiste n’est pas essentiellement religieux. C’est une expression selon laquelle la population est fatiguée des régimes corrompus, dit-il.