De la langue des maraudeurs venus de la mer nous viennent gun, glitter, slaughter et scalp ; de ces mêmes colons nous viennent egg, whisk, gust et lemming. Ils nous ont apporté mari, païen et les pronoms à la mode ils, eux et leur. Le norrois nous a également donné jupe (la mode des envahisseurs était admirée), berserk (de « bare-shirts », les guerriers fous qui se lançaient dans la bataille sans armure) et window (de « wind’s eye », l’œil du vent). Le ciel et, comme il se doit, le droit, nous viennent du norrois, sans parler des mots oaf, blister, guest et ombudsman. Ce ne sont donc pas seulement les bastions européens que sont l’Italie, l’Allemagne et la France qui ont influencé ce que nous disons ; le monde nordique jette également une longue et belle ombre sur ce que nous disons. Les Orcades parlaient principalement norvégien jusqu’au XVIe siècle, un siècle entier après que Jacques III eut reçu les îles de Marie de Danemark.

La dernière phase des invasions vikings, à partir des années 980, a vu les rois d’Angleterre tenter frénétiquement de les racheter en versant des sommes exorbitantes au titre de la protection, le Danegeld. Mais l’assimilation croisée des cultures anglaise et danoise a permis à deux monarques danois, Sweyn Forkbeard et son fils Cnut, de régner sur l’ensemble de l’Angleterre au XIe siècle. Les liens étroits entre les peuples germaniques et scandinaves remontent à la préhistoire : Le roi Alfred avait fait remonter ses ancêtres à la maison de Woden, et certains jours de la semaine étaient nommés d’après des versions germanisées des dieux nordiques.

Cnut possédait un véritable empire de la mer du Nord, régnant non seulement sur la Norvège et le Danemark, mais aussi sur l’Angleterre de 1017 à 1035. Lors de la crise de succession qui suivit la mort d’Édouard le Confesseur, le roi Harald Hardrada de Norvège tenta de s’emparer du trône d’Angleterre ; si son armée considérable n’avait pas été vaincue par le roi anglais Harold Godwinson à Stamford Bridge en 1066, nos liens avec la Norvège seraient encore plus évidents.

Les liens entre les monarchies britannique et norvégienne perdurent encore aujourd’hui. Les deux pays ont des monarchies constitutionnelles et la reine Élisabeth II était la cousine au second degré du roi Harald V, l’actuel monarque norvégien. Les deux pays ont également beaucoup d’autres points communs. La Grande-Bretagne et la Norvège ont toutes deux embrassé la Réforme protestante au XVIe siècle, elles ont de vastes côtes, un temps maussade, un État-providence intrinsèque à l’identité nationale, une certaine réserve et un penchant pour les séries policières authentiques. Le projet des Orcades de rejoindre le royaume de Norvège n’est peut-être pas si farfelu après tout.